Je suis un mécanicien du fonctionnement des personnes et des équipes. Mon métier est de les aider à développer une coopération saine et efficace. Comme tout bon mécanicien j’ai besoin d’outils précis, cohérent, applicable et adaptable à des situations spécifiques.
Mon premier outil de travail est constitué des mots que j’utilise pour présenter les concepts dont je me sers et pour échanger efficacement avec mes interlocuteurs.
Je tente donc d’utiliser les mots à bon escient. J’ai constaté que certains mots ne sont pas aussi synonymes qu’il peut y paraître. Je me propose de partager quelques réflexions à ce sujet. Prenons l’exemple de la souffrance et de la douleur.
De mon point de vue la douleur est horizontale, elle est physique. Son rôle est de nous alerter : une brûlure me dit : « attention, ce plat est très chaud ! ». Le mal de dents, d’estomac, de genou me dit qu’il y a un problème dans la zone physique concernée.
Pour moi, la souffrance est verticale, elle ne touche pas le corps mais l’esprit, voire l’âme. Lors des jeux olympiques l’athlète victime d’un claquage ressent immédiatement une vive douleur physique, puis, dans un deuxième temps, lorsque son esprit prend la relève, il peut éprouver une souffrance lorsqu’il se rend compte qu’il ne pourra pas participer à la finale, que tous ses efforts et ses sacrifices auront été vains, que son entraîneur, ses proches et toutes les personnes qui avaient mis des espoirs en lui vont être déçus.
C’est la différence entre éprouver une douleur et ressentir une souffrance. J’ai exposé cette différence dans mon ouvrage sur la coopération positive. Je me propose de la détailler à nouveau ultérieurement.
Ces sens différents sont-ils anecdotiques ? Pas toujours. Reprenons la différence entre la douleur et la souffrance avec un exemple : dans un ouvrage très connu de certains érudits et de certains religieux une phrase fait état d’une situation particulière qui peut être interprétée au moins de deux façons en fonction des mots choisis.
Première version : « tu accoucheras dans la douleur ». Cela peut signifier que, de par leur nature, les femmes sont là pour en baver. Certains peuvent même y voir une punition divine pour une faute originelle, voire une preuve d’une condition inférieure.
Deuxième version : si nous remplaçons douleur par souffrance et accoucher par enfanter, cela donne : « tu enfanteras dans la souffrance ». Dans ce contexte, enfanter peut vouloir dire faire naître et grandir la part noble voire divine qui est en toi. La souffrance signifie que cela ne va pas être de la tarte, que cela pourra être un chemin long et sinueux. Cette phrase devient alors universelle. Elle ne s’adresse plus uniquement aux femmes mais à tous les êtres humains.
À chacun de choisir l’option qui a sa préférence et les conséquences qu’elle implique.
Affaire probablement à suivre avec d’autres « synonymes » telles que erreur et faute, sanctionner et punir, orgueil et fierté, se souvenir et se rappeler, briller et rayonner, coopérer et collaborer, émotion et sentiment…
Et, si vous le souhaitez, je serais ravi de connaître certains « synonymes » que vous avez décortiqués.